Actualité 23 janvier 2023

Perspectives d’acteurs : Braxton Woodham

Président, Unfinished Labs

AUTHOR

  • Léa Roubinet Project Assistant, Renaissance Numérique

Dans le cadre de ses réflexions sur les réseaux sociaux décentralisés, Renaissance Numérique a interviewé Braxton Woodham, Président d’Unfinished Labs, qui promeut une architecture plus éthique et plus citoyenne du Web. Parmi d’autres projets, Unfinished Labs travaille notamment sur des solutions visant à faciliter le développement de réseaux sociaux décentralisés. En particulier, au sein de Project Liberty, Braxton Woodham et son équipe ont développé un protocole, le Decentralized Social Networking Protocol (ou DSNP). Ce dernier permet de décentraliser les graphes sociaux des internautes, en établissant un graphe social partagé qui ne dépend plus d'une application spécifique ou d'une plateforme centralisée. Dans cet entretien, il revient sur ce qui différencie le DSNP des autres projets de type “Web3”, sur la manière concrète dont ce protocole pourrait être utilisé par les développeurs d'applications et les utilisateurs, et enfin, sur les défis qu’il reste à relever en termes d'adoption.

Dans le cadre de Project Liberty, pourquoi avez-vous décidé de donner la priorité à la décentralisation des graphes sociaux1 ?

La réponse courte serait de dire que nous voulions nous assurer de pouvoir offrir aux utilisateurs toute la puissance de l’Internet mondial. Pour aller un peu plus dans le détail, en 2006, nous avons construit, avec notre équipe d’architectes, un réseau social mobile axé sur la vidéo. En le développant, nous avons compris l’importance du graphe social, qui est la structure de données centrale permettant de débloquer tous les effets de réseau. Les graphes sociaux sont si puissants que, lorsqu’ils sont capturés à l’intérieur des plateformes, ils créent une situation de « winner-takes-all ». On peut voir cette situation par exemple avec Meta ou Twitter autour de différentes modalités : les textes pour Twitter et les images pour Instagram. 

Selon nous, ces effets de réseau devraient être une ressource publique accessible à tous les créateurs d’applications. Il devrait ainsi y avoir plus de variété et moins de concentration de pouvoir au sein d’un groupe ou d’une entité. Ce sont les raisons pour lesquelles nous pensons qu’il est primordial de décentraliser les graphes sociaux et, ce faisant, de décentraliser les réseaux sociaux. 

Quand vous dites que ces effets de réseaux devraient être une ressource publique, qu’entendez-vous exactement par « publique » ?

Je veux dire par cela que “l’échafaudage” de base du graphe social devrait être universellement accessible. Les individus utilisent leurs graphes sociaux à la fois dans des contextes privés et publics. Une partie de ce graphe sera donc universellement accessible. Certaines des données qu’il contient seront elles-mêmes également universellement visibles. Mais d’autres aspects du graphe social pourraient être privés et cryptés, être limités à des cercles sociaux plus restreints et locaux. Le graphe social doit être une infrastructure accessible au public, bien que les données qu’il contient puissent elles-mêmes être privées ou publiques. Nous travaillons avec des chercheurs en sciences sociales à cet égard. Nous examinons la façon dont le monde réel fonctionne afin de le reproduire dans le monde numérique. 

Quelle est la valeur ajoutée du Decentralized Social Networking Protocol2 (DSNP), vis-à-vis d’autres protocoles qui permettent également la décentralisation des graphes sociaux, tels que DeSo ou Lens

Le DSNP intègre trois notions fondamentales qui, à ma connaissance, le rendent unique dans cet espace. 

Premièrement, la notion de décentralisation introduit une différence par rapport à des plateformes comme Facebook, mais aussi par rapport à tout autre réseau social de la génération actuelle, comme Reddit. 

Le deuxième attribut qui distingue le DSNP est sa capacité à présenter des faits ou des vérités immuables : lorsque vous documentez des crimes de guerre en Ukraine, ou traitez des informations sur une pandémie, vous voulez être sûr que ces faits sont immuables. Pour cela, la blockchain nous semble indispensable. Cet aspect distingue le DSNP non seulement de plateformes comme Facebook, mais aussi de protocoles comme Scuttlebutt, qui est un protocole peer-to-peer, ou de Mastodon, qui est un réseau social fédéré. Ces derniers, selon nous, ne sont pas à la hauteur.

Le troisième aspect qui différencie le DSNP des autres projets de type Web3 est qu’il est exempt de toute logique économique. Selon nous, dès lors qu’un protocole est lié à des incitations économiques, il sera tôt ou tard capturé par une minorité d’acteurs. C’est pourquoi il est important pour nous de ne pas lier le DSNP à un système de jetons (ou tokens) : il est « blockchainisable » mais pas liée à une blockchain. Nous traitons les blockchains comme des serveurs Web : quatre blockchains différentes pourraient prendre en charge le DSNP, et vous pourriez interopérer entre les quatre blockchains différentes. Nous construisons la première, appelée Frequency, sur Polkadot, mais le DSNP est un protocole open source et n’importe qui pourrait également construire une blockchain autour.

"Le troisième aspect qui différencie le DSNP des autres projets de type Web3 est qu'il est exempt de toute logique économique. Selon nous, dès lors qu’un protocole est lié à des incitations économiques, il sera tôt ou tard capturé par une minorité d’acteurs."

Savez-vous si d’autres acteurs, au-delà de Projet Liberty, ont commencé à développer des solutions basées sur le DSNP ?

Oui, nous avons un certain nombre de projets qui commencent à avancer, qui mettent en œuvre le DSNP via la blockchain Frequency. Différents groupes en France, aux États-Unis et au Canada nous demandent des informations pour développer des applications autour du DSNP et de Frequency. On commence à entrevoir un début de mouvement. En outre, nous avons annoncé MeWe comme premier partenaire stratégique, qui travaille sur Frequency au déploiement du DSNP à une certaine échelle. Mais il est important de noter que Frequency ne sera lancée qu’en décembre 2022. Pour l’heure, il n’est donc pas encore possible de créer des applications reposant sur le DSNP et sur Frequency.

Comment envisagez-vous le fonctionnement des graphes sociaux basés sur le DSNP ? Y aura-t-il une interface dédiée où les utilisateurs pourront modifier leur graphe (ajouter des amis, les supprimer, etc.) ? 

Les individus utiliseront sans doute différentes applications créées par différents entrepreneurs pour leur vie sociale en ligne. Nous imaginons une sorte de bouton de connexion universel qui ne sera pas lié à une entreprise particulière. Actuellement, vous pouvez vous connecter avec Facebook ou avec Google, par exemple. Nous sommes en train de coder un système similaire en interne, qui vous permettra de vous connecter « avec Liberty ». Il s’agira d’un système à but non lucratif, qui permettra à chaque citoyen de disposer de sa propre identité souveraine (self sovereign ID). Il ne peut pas y avoir qu’un seul fournisseur d’identité. C’est pourquoi nous sommes pour la multiplication du nombre de fournisseurs d’identités souveraines. Encore une fois, nous sommes très attentifs à ce que ces protocoles restent ouverts, à ce qu’une société privée ne puise pas se les accaparer. Nous voulons que cela reste un code open source à but non lucratif.

Nous sommes également convaincus de l’importance de la portabilité des graphes sociaux ou, en d’autres termes, la possibilité d’y accéder à partir de différentes applications. Nous avons assisté à l’échec de « Circles » sur Google+ au début des années 2000. Ce que j’en ai retenu, c’est que les individus ne prendront pas le temps de gérer leurs cercles de relations. Ils auront toujours différentes applications pour différents usages (usages professionnels, rencontres, partage familial, etc.) et adopteront certainement à peu de choses près le même comportement qu’aujourd’hui. Cependant, au niveau de la couche protocolaire, il y aura un substrat universel qui nous permettra de passer plus facilement d’une app à l’autre, d’une manière qui n’est pas possible aujourd’hui. Ce que nous imaginons, c’est un bouton d’ouverture de session unique, un moyen facile de trouver vos amis ou collègues, de récupérer certaines de vos informations, ou de partager ce que vous souhaitez partager dans une application donnée. Ce n’est pas radicalement différent, mais ce sera plus pratique pour tout le monde.

Néanmoins, la blockchain est un type de base de données très spécifique : elle est publique, mais aussi très coûteuse et lente à lire et à écrire. Par conséquent, ses utilisations doivent être extrêmement limitées. Nous souhaitons qu’une très petite fraction d’informations y soit stockée : pas vos photos de profil, vos messages et ce genre de choses. Nous pourrions plutôt y stocker des hashes d’images, par exemple. 

Et en ce qui concerne le recueil de notre consentement pour la collecte et le traitement de nos données personnelles, comment cela va-t-il fonctionner ? 

Tout d’abord, il y a tout un volet « Politique » en cours de construction au sein de Projet Liberty, en plus des volets « Technologie », « Gouvernance » et « Mouvement » : nous savons qu’il est illusoire de vouloir résoudre tous les problèmes uniquement grâce à la technologie. Nous croyons fermement que les individus devraient avoir le contrôle de leurs propres données. Or, aujourd’hui, lorsque vous confiez vos informations à un réseau social, il n’existe aucun moyen technique de s’assurer que l’application supprime vos données si vous le demandez. Il faudrait donc mettre en place une réglementation stipulant que les applications doivent fournir un moyen de révoquer les autorisations de collecte et de traitement des données personnelles. 

Le DSNP offre un moyen spécifique de révoquer ce genre d’autorisations. Par la suite, des réglementations pourraient veiller à ce que les applications l’appliquent réellement et suppriment effectivement les données. Cela variera en fonction des territoires. Il n’y aura pas, du moins dans un avenir proche, de politique universelle en matière de données personnelles. Par conséquent, nous veillerons à ce que le protocole soit suffisamment souple pour prendre en compte ces différences.

"Nous croyons fermement que les individus devraient avoir le contrôle de leurs propres données. Or, aujourd'hui, lorsque vous confiez vos informations à un réseau social, il n'existe aucun moyen technique de s'assurer que l'application supprime vos données si vous le demandez. Il faudrait donc mettre en place une réglementation stipulant que les applications doivent fournir un moyen de révoquer les autorisations de collecte et de traitement des données personnelles."

La première mise en œuvre du DSNP va être effectuée par MeWe, un réseau social existant. Si cette migration est un succès, envisagez-vous d’intégrer le DSNP à d’autres réseaux sociaux existants ?

C’est notre objectif. Nous serions ravis que le DSNP soit adopté par tous. Au bout du compte, nous espérons qu’il deviendra un protocole majeur, comme HTTP

MeWe sera le premier réseau social à intégrer notre protocole. Il s’agit d’un réseau social axé sur la protection de la vie privée, qui n’a donc pas besoin de modifier son service de manière fondamentale pour passer au DSNP. Le protocole, tel quel, est particulièrement compatible avec leur philosophie et leur service. MeWe compte 20 millions d’utilisateurs, et nous sommes convaincus que cette implémentation prouvera qu’il est possible de transitionner vers cette nouvelle infrastructure sans avoir de problèmes d’échelle. Lorsque la migration aura eu lieu, MeWe sera le plus grand réseau social décentralisé au monde, mais il restera évidemment minuscule comparé à Facebook. Le changement d’échelle est un aspect primordial de notre feuille de route, et nous nous y attelons étape par étape.

Enfin, lorsque nous parlons de migration plutôt que d’adoption – même si nous pensons qu’à un horizon cinq ans, la plupart des applications de réseaux sociaux que nous utiliserons seront nouvelles et entraîneront de nouveaux usages (Web3) –, c’est parce que nous pensons qu’il est urgent d’extirper les individus de l’économie de la surveillance. C’est pourquoi nous nous concentrons sur la migration.

Allez-vous, chez Unfinished Labs, au-delà de la couche infrastructurelle ? En d’autres termes, travaillez-vous vous-mêmes sur des projets d’applications basées sur le DSNP ?

Oui, avec notre équipe technique, nous avons travaillé sur toutes les couches pour nous assurer que tout fonctionne. Nous avons par exemple créé des applications sur Android et iOS, qui fonctionnent avec le protocole. Toutefois, nous ne créons pas d’applications commerciales. Nous en construisons certaines pour étudier la faisabilité et le développement, mais nous travaillons essentiellement à soutenir Frequency – qui est l’infrastructure de couche 1 – et son écosystème, via un mélange de partenariats, de subventions et d’investissements.

Il nous fallait absolument une blockchain de couche 1 qui soit conçue pour la dynamique des réseaux sociaux et qui soit durable d’un point de vue environnemental, c’est-à-dire fondée sur la preuve d’enjeu (proof of stake ou PoS), plutôt que sur la preuve de travail  (proof of work ou PoW). Comme nous n’en avons pas trouvé, nous sommes arrivés à la conclusion que nous devions la construire nous-mêmes. C’est ainsi qu’est née Frequency. Polkadot est apparu comme le meilleur choix sur le plan technique. En outre, leurs équipes partagent notre vision selon laquelle le Web3 ne devrait pas se résumer aux NFT et à la création de richesses, mais devrait avant tout impulser la construction d’une nouvelle génération d’Internet, qui profite à tous. 

Si les réseaux sociaux décentralisés ne sont pas propriétaires des données de leurs utilisateurs, le modèle économique basé sur la monétisation des données personnelles ne peut pas, de facto, être reproduit. Comment envisagez-vous le modèle économique des réseaux sociaux décentralisés ? 

Nous envisageons différents modèles. Tout d’abord, au niveau de l’infrastructure et du stockage, vous paierez pour ces services comme vous le faites aujourd’hui pour les services de cloud, par exemple. La seule différence est qu’ils seront décentralisés et fonctionneront sur des infrastructures blockchain à jetons. Ensuite, au niveau des couches supérieures, vous paierez pour diffuser des messages (poster une vidéo, commenter, liker, etc.) avec des jetons que vous pourrez gagner grâce à votre activité sur le réseau social. Alors qu’aujourd’hui, les individus ne sont pas rémunérés dans le monde numérique, nous imaginons un échange de valeur beaucoup plus bidirectionnel, de sorte que les individus pourront être rémunérés d’une certaine manière pour leur temps, leurs efforts et leurs contributions.

En outre, les entreprises pourront interagir avec leurs clients de manière plus ouverte, transparente et équitable. Elles pourraient, par exemple, rémunérer les clients qui ont testé leurs produits. Les entreprises pourraient vous demander directement vos préférences et elles en apprendraient beaucoup plus sur vous que si elles vous surveillaient sur les réseaux sociaux. Pour votre contribution, vous pourriez recevoir une compensation financière. Aucun mécanisme de ce type n’existe aujourd’hui, et cela pourrait être formidable pour l’économie, pour les fabricants et pour les consommateurs.

"Alors qu'aujourd'hui, les individus ne sont pas rémunérés dans le monde numérique, nous imaginons un échange de valeur beaucoup plus bidirectionnel, de sorte que les individus pourront être rémunérés d’une certaine manière pour leur temps, leurs efforts et leurs contributions."

Quel est, à votre avis, le principal obstacle à l’adoption à grande échelle des réseaux sociaux décentralisés ? Comment démocratiser ces réseaux ? 

Il y a deux obstacles. Le premier est qu’il n’existe pas de réseau idéal à utiliser pour l’instant (mais cet obstacle sera bientôt franchi, grâce à notre projet et d’autres). Il existe des réseaux décentralisés fédérés, comme Mastodon, qui veulent bien faire. Mais ils ont été conçus avant que les dernières technologies ne soient disponibles. Il faut que la technologie soit disponible, et ce sera le cas dans quelques trimestres. 

Une fois cette barrière dépassée, le prochain grand obstacle sera l’adoption par le grand public de ces nouvelles technologies : les individus devront apprendre à utiliser des portefeuilles numériques, par exemple, et il faudra qu’ils puissent bénéficier d’une bonne expérience utilisateur. Cet obstacle aura à la fois un aspect culturel – les individus devront apprendre – et un aspect technique – les créateurs d’application construiront de meilleures interfaces. Si nous faisons le parallèle avec l’Internet, n’oublions pas que nous ne savions pas comment utiliser un navigateur il y a vingt ans. 

Comment pouvons-nous techniquement lutter contre la prolifération de contenus nocifs ou illicites sur les réseaux sociaux décentralisés ? Project Liberty y travaille-t-il ?

Tout d’abord, côté Project Liberty, nous sommes convaincus qu’il ne s’agit pas seulement de technologie. Un même marteau peut être utilisé pour construire une maison ou pour tuer quelqu’un, par exemple. Avec l’émergence d’organisations autonomes décentralisées, il y a aussi des aspects de régulation et de gouvernance à prendre en compte. 

Ensuite, en matière de technologie, nous nous concentrons sur un développement axé sur les valeurs. Nous ne visons pas seulement une durabilité économique, mais aussi une durabilité environnementale et culturelle. En outre, grâce au graphe social universel, nous introduisons une vision de la modération fédérée. Chaque application et service serait en mesure d’accéder aux informations et messages publics. Imaginez que tout message mentionnant « Covid-19 » puisse être consulté par une organisation médicale. Elle pourrait alors les noter comme étant exacts ou non. À un niveau supérieur, on pourrait avoir des consortiums d’experts certifiés. La couche applicative pourrait s’en remettre à un consortium spécifique en fonction des contenus à modérer. Grâce à ce protocole, des experts seraient ainsi mis à contribution. L’objectif est de décentraliser la modération et de la rendre participative. La blockchain est clé ici, car nous pourrions utiliser des jetons non transférables, et pas uniquement des jetons non fongibles (NFT), pour les diplômes ou les certifications. Cela vous donnerait les accréditations nécessaires pour participer à la modération. 

Aujourd’hui, sur les réseaux sociaux, il est impossible de savoir qui est qui et, pour grossir le trait, ce sont les personnes les plus drôles ou qui parlent “le plus fort” qui ont le plus d’écho. Au lieu de cela, nous cherchons à reproduire le monde analogique, dans lequel il est possible de différencier les individus. Internet a été une invention formidable, qui a créé un terrain de jeu égalitaire, permettant à n’importe quel individu ordinaire de faire entendre sa voix. Mais l’inconvénient, c’est qu’on ne peut plus différencier les experts des autres individus.

"L'objectif est de décentraliser la modération et de la rendre participative. La blockchain est clé ici, car nous pourrions utiliser des jetons non transférables, et pas uniquement des jetons non fongibles (NFT), pour les diplômes ou les certifications. Cela vous donnerait les accréditations nécessaires pour participer à la modération."

1 Un graphe social est le modèle de représentation de toutes les relations et interactions d’un individu sur un réseau social : ses amis, abonnés ou contacts, ses « j’aime », ses commentaires, ses publications, etc.

2 Protocole de réseautage social décentralisé, en français.


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